Les séquelles des usines à chiots

22 juillet 2019

Des chercheurs ont prouvé que la négligence qui prévaut dans les usines à chiots pourrait avoir un effet permanent sur leur comportement. Notre collaboratrice raconte.


Dix ans se sont écoulés depuis que je me suis occupé de chiens issus d’usines à chiots, saisis par deux organismes venant en aide aux animaux. Outre leurs problèmes de santé, ces bêtes avaient l’air aussi traumatisées que des prisonniers de guerre. Certaines sursautaient au moindre mouvement et s’aplatissaient dans leur cage dès qu’un humain approchait. D’autres tournaient continuellement en rond. D’autres encore avaient le regard absent et ne réagissaient plus à rien. « Faites de moi ce que vous voulez », semblaient-elles dire. Des images qui me hanteront toute ma vie.


Vétérinaire et directeur des études sur le bien-être animal à Best Friends Animal Society (bestfriends.org/about-best-friends), en Utah, le Dr Frank McMillan a participé aux rares études scientifiques sur les usines à chiots, en compagnie de chercheurs de l’École de médecine vétérinaire de l'Université de Pennsylvanie. Ses propos sont sans équivoque : les chiens qui sont reproduits massivement pour être vendus, qui passent leur vie dans des cages minuscules et insalubres, et qui n’ont aucun contact chaleureux avec un humain ne souffrent pas seulement durant leur captivité. Ils conservent des séquelles de cet enfer toute leur existence.


Les chiens sont fondamentalement sociaux, affirme le Dr McMillan. Ils partagent notre vie depuis des milliers d’années et, au fil du temps, ils sont devenus de plus en plus dépendants de nos soins et de notre affection.


« Lorsque leurs besoins émotionnels ne sont pas assouvis, non seulement ils pâtissent mais le développement de leur cerveau est altéré, explique le chercheur. Certaines connections ne se font simplement pas, et les animaux deviennent incapables de se comporter normalement par la suite. »


Les orphelins de Roumanie
La situation est comparable à celle des enfants souffrant de grave négligence. Le plus triste exemple est celui des orphelins de Roumanie, que le monde a découverts après la chute du rideau de fer, en 1989. Une centaine de milliers d’enfants vivaient alors dans d’horribles institutions où ils recevaient peu de soins. Certains adultes qui devaient s’occuper de 100 bébés à la fois posaient un biberon dans les berceaux, en espérant que les nourrissons tètent tout seuls. C’est à peine s’ils étaient changés de couche, et aucun n’était cajolé ni réconforté, comme il l’aurait été dans des conditions normales.


Résultat : certains bambins n’arrivaient pas à parler et se traînaient sur le sol au lieu de marcher. D’autres se balançaient d’avant en arrière ou se frappaient la tête contre un mur. La plupart avaient du mal à donner et à recevoir de l’affection. Et plus ils avaient vécu longtemps en institution, plus les problèmes étaient graves.


« La science a démontré que le lien d’attachement avec une figure aimante se produit au début de la vie et se renforce avec le temps » - Dr Frank McMillan.


« Plus les besoins émotionnels d’un individu sont comblés dès sa naissance, plus il peut s’attacher, faire confiance, se développer et mener une vie normale, poursuit le Dr McMillan. Ces principes s’appliquent aussi aux chiens, à quelques détails près », précise-t-il.


L’essentiel besoin d’affection
Heureusement, certaines victimes d’usines à chiots ont ressuscité après avoir été adoptées, relate avec joie le chercheur. C’est grâce à ce qu’on appelle la résilience. « Leur cerveau est parvenu à créer de nouvelles connections, et ces bêtes ont pu apprendre à communiquer et à devenir de bons compagnons. Mais beaucoup n’ont jamais su le faire. », conclut Frank McMillan.


La bonne nouvelle, c’est que les groupes de défense des animaux font de plus en plus pression sur les différents gouvernements pour éradiquer le problème des usines. Aussi, le public semble plus conscient que se procurer un chiot dans une animalerie ou sur un site de vente en ligne sans connaître la provenance de l’animal n’est pas nécessairement la bonne façon d’obtenir un animal en bonne santé.


Heureusement, certaines histoires finissent bien. Demain, découvrez la fabuleuse histoire de résilience de Emily, et lisez comment elle a surmonté les séquelles laissées par son passage dans les usines à chiots.

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