Nous sommes au pied du mont Kenya, au Lewa Safari Camp, dans le centre du pays. Ce lodge appartient à lâune des familles les plus anciennes du Kenya, les Craig/Douglas. Petit potin, Lewa est lâun des lieux de vacances de prédilection de la famille royale britannique. Câest ici dâailleurs que William a demandé Kate Middleton en mariage. Mais de manière plus importante, tout comme les 15 sanctuaires majeurs de lâAfrique de lâEst, la Lewa Wildlife Conservancy réinvestit ses profits dans des mesures de sauvegarde de différentes espèces, de lutte contre le braconnage et de développement. Sans compter ses programmes dâaide aux populations locales, en interaction constante avec les animaux vivant sur leur territoire.
Lâinattendu en savane
Dâabord, il faut se lever de bonne heure. Les journées commencent avant lâaube, alors que les animaux sont actifs. Les visites parmi les troupeaux de gnous, de zèbres ou de rhinos sont autant de leçons dâécologie, de biologie, dâéconomie, de mondialisation, dâindustrialisation ou dâenvironnement! Mais ce sont aussi des histoires de vie.
Ce nâest pas tous les matins quâon assiste à la capture dâun bébé gazelle par un duo de chacals et quâon voit la mère hurler sa détresse pendant que les attaquants déchirent leur proie. Ce matin-là , nos hôtes massaïs avaient eu beau nous préparer un fabuleux déjeuner en pleine savane, personne nâa rien avalé.
Safari sans fusil
Ces escapades dâexploration sont appelées des game drives, le « jeu » consistant à trouver, dans la savane, où se cachent les animaux pour mieux les observer. Les possibilités de rencontres sont toujours décuplées à l'aurore et au crépuscule, et les animaux les plus sollicités sont ceux du Club des Cinq, connus sur la planète sous le nom de Big Five (le lion, le guépard, lâéléphant, le buffle et le rhinocéros). Ils sont recherchés pour leur rareté et leur aspect impressionnant, et font tous partie de programmes de protection. Les lions à eux seuls sont des rois bien fragiles, si lâon songe que ces 50 dernières années, leur population a décliné de 95% en Afrique!
Toujours étonnant dâailleurs de voir le regard jaune dâun de ces rois de la jungle soutenir le nôtre, pendant quâon le mitraille à coup de Nikkon. « Hakuna Matata! Pas de problème! Ils vous confondent avec le camion », répète le guide. Il faut le dire : on nâest jamais vraiment préparé à la rencontre de son premier lion. Ãa cogne dur dans le cÅur.
La tête, rien que la tête, est immense. Et les pattes! Et les griffes! OMG! Pendant que je change dâobjectif en tremblant, je pense à ces lions dans les dessins animés ou dans les magazines - les seuls que jâai vus dans ma vie. Aucun nâa autant de cicatrices. Il est là , impassible, sa lionne à ses côtés. Je comprends pourquoi le lion, câest le roi. Et de toute la jungle, je décrète sur-le-champ que câest mon préféré.
Je me souviens quâaprès avoir quitté les lions, jâai rencontré des éléphants. à cinq mètres de nous, chicane de famille. Lâun tente de déraciner un arbre. Il tire sur les branches. Le bruit du bois qui se déchire fend lâair. Lâautre pioche au sol. Ãa fait peur. Mon compagnon de voyage fixe quelque chose derrière moi. Je me retourne doucement. Deux éléphanteaux se caressent à grands coups de trompe. En arrière-plan, le soleil descend.
Nous nous mettons en route vers notre petit déjeuner. Dans ma tête, câest décidé : mon animal préféré, câest désormais lâéléphant.
Mais, au moment de statuer, je nâavais pas encore rencontré les girafesâ¦
Notre rédactrice en chef sâest rendue au Kenya alors que Greta Thunberg nâétait encore quâune petite fille, et juste avant les séries dâattaques revendiquées par les islamistes somaliens shebab. âAujourdâhui, je nây retournerais sans doute pas, mais en cette Fête mondiale des animaux, jâai plus dâune pensée envers ces bêtes sauvages et envers leur lutte - et la nôtre - pour la survie.â
Crédits : Josée Larivée